D’ale carnavalului (Ion Luca Caragiale)
Les quatre « grands classiques » de la littérature roumaine sont : le poète Mihai Eminescu (1850-1889), le conteur Ion Creangă (1837-1889), le romancier Ioan Slavici (1848-1925) et le dramaturge Ion Luca Caragiale (1852-1912). D’un réalisme époustouflant, dans ses comédies, Ion Luca Caragiale met à l’index des tares morales de la société de son temps qui se perpétuent jusqu’à nos jours.
Dans la comédie D’ale carnavalului (Du carnaval), l’auteur critique l’infidélité dans le couple. Les situations d’infidélité, présentées lors du premier acte dans les circonstances de la vie quotidienne (un salon de beauté), se démultiplient en passant de la vie réelle à la vie « masquée » dans l’acte deux de la pièce (un bal masqué à Bucarest) où les personnages non seulement sont déguisés, mais où ils changent de costumes entre eux, au fur et à mesure du bal, pour échapper au regarde des partenaires de la maison qui, en principe, auraient pu reconnaitre les masques et suivre leur évolution.
Ainsi, déguisés ou non, les coupables poursuivent leur adultère et, en plus, ils ont la ruse de faire croire à leurs partenaires (Acte II) qu’ils se méprennent sur la tromperie et que leur vie est exemplaire.
La scène XII que nous reprenons ici met en scène la stratégie d’évasion du bal de Nae Girimea, le patron du salon de beauté, une sorte de Don Juan, accompagné par une de ses maitresses, Didina, la femme de Pampon. Les autres personnages qui apparaissent dans cette scène sont : Iordache, un des employés de Nae Girimea ; Mița, une autre amante de Nae ; Crăcănel, le mari de Mița ; Catindatul [fr Le candidat] et O Mască [fr Une masque]. Si l’écrivain fait des personnages principaux les personnages de la société à blâmer, à critiquer, il n’oublie pas la normalité, les gens de bon sens qui font la majorité de la société, qui est représentée par ces deux derniers personnages du peuple qui portent des noms génériques et restent dans l’anonymat.
ACTUL II, SCENA XII
DIDINA în domino roşu, NAE în costumul de la început al Catindatului, vin din bufet; apoi IORDACHE, apoi CATINDATUL şi O MASCĂ tot din bufet
DIDINA Da. (îşi scoate masca, Nae asemenea.) Când am venit adineaori în bal m-a cunoscut unul. El trebuie să fi fost, Crăcănel al tău... ştie că mă cheamă Didina Mazu, ştie de Pampon, ştie că-i zice lui Pampon «Conţină cu 5 Fanţi». în sfârşit, m-a cunoscut bine! D-aia mi-am schimbat costumul. Haide, Haide, Nae, să mergem; mi-e frică... (se aude cadrilul.)
NAE Da, haide să mergem, e târziu.
IORDACHE (intrând din bal repede) Tot aici sunteţi? Pleaţi, plecaţi degrabă! Crăcănel, Pampon şi Miţa, toţi trei, vă caută să facă scandal... Fugiţi!
DIDINA ‘Aide! (îşi pune masca.)
NAE Dacă am putea să ieşim fără să mai dăm prin bal... (îşi pune masca.)
IORDACHE Nu se poate, altă ieşire nu-i; haideţi! (îşi pune şi el masca.)’
CATINDATUL (cu o Mască pe care o aduce cam cu d-a sila la braţ; e cu chef, îşi scoate masca şi vorbeşte tare de tot) Aşa sunt eu... Uite şi prietenii.
NAE (încet) Dracul să te ia!
MASCA (vrând să-i scape de la braţ) Lasă-mă.
DIDINA Cine-i ăsta? (Nae, Iordache şi Didina vorbesc încet deoparte.)
CATINDATUL Aşa sunt eu; când mă magnetizez, mi-e cald... Pfu!... Şi când mi-e cald, pfu! Tachinez... Trebuie să te fac un cadril. Iacă ne-am găsit vizaveaua...
DIDINA Haide! (voi să plece.)
CATINDATUL Ce vă duceţi? Nu se poate să vă duceţi! (le taie drumul.) Trebuie să facem un cadril.
NAE Mersi, drăguţă, ne ducem acasă...
CATINDATUL Acasă? Cu costumul meu? Nu se poate, (strigă tare.) Dacă vă duceţi, dă-mi înapoi costumul, tre buie să-mi dai costumul, nu te las să pleci cu costumul...
NAE (încet) Ne mai întârzie dobitocul!
DIDINA (încet) Schimbă costumul şi pace!
IORDACHE (încet) Nu se poate, o să ieşim prin bal: Miţa cunoaşte costumul...
NAE (încet) Ce e de făcut?
IORDACHE (încet) Spune-i că mai rămânem...
DIDINA (încet) Şi ne strecurăm binişor şi ieşim...
NAE (tare) Dacă-i aşa, ştii ce? ‘Ai să mai rămânem.
IORDACHE Să mai rămânem...
DIDINA Să mai rămânem...
CATINDATUL Aşa da! ‘Ai să facem cadrilul...
IORDACHE în bal?
NAE Nu merg în bal.
CATINDATUL Atunci aici; sunt magnetizat, am poftă de cadril, să-mi fac vânt. Unde e nenea Iancu să mă vază!
IORDACHE (încet lui Nae şi Didinei) Jucaţi-l o figură, două, până uită de costum, şi pe urmă o ştergem, (vorbesc încet toţi trei.)
MASCA Ţi-am spus că mi-e frică să nu mă vază bărbatu-meu... (luptă să scape.)
CATINDATUL Ei! Parcă mie nu mi-e frică de nenea Ian cu... (Masca se smuceşte, scapă şi fuge; uitându-se după ea.) Atâta pagubă! (merge şi invită la danţ pe Iordache.) Ei, ‘aide! Ce faceţi? (îşi pune masca pentru danţ.)
NAE Ei haide, de! (Se aude o figură ca cadrilului. Nae danţează cu Didina, Catindatul cu Iordache ca damă. La a doua parte a figurii contra danţului, apar în fund Pam pon, Crăcănel şi Miţa mascaţi.)
ACTE II, SCÈNE XII
DIDINA en domino rouge, NAE en costume du début du bal de Catindatului, ils arrivent du buffet; puis IORDACHE, puis CANDIDAT et UN MASQUE également du buffet
DIDINA Oui. (Elle enlèvent son masques, tout comme Nae.) Quand je suis venu pour tout à l’heure au bal, l’un d’eux m’a reconnue. Il doit avoir été, votre Crăcănel ... il sait que je m’appelle Didina Mazu, il connaît Pampon, il sait qu’on nomme Pampon « Conţină cu 5 Fanţi». Enfin, il me connaissait bien! C’est pourquoi j’ai changé de costume. Allez, viens, Nae, allons-y; J’ai peur ... (on entend le quadrille.)
NAE Oui, allons-y, il est tard.
IORDACHE (entrant rapidement dans le salon du bal) Êtes-vous toujours là? Partez, partez tout de suite! Crăcănel, Pampon et Mita, tous les trois, sont à la recherche d’un scandale ... Fuyez!
DIDINA! Allons-y (met son masque.)
NAE Si nous pouvions sortir sans passer par le salon du bal ... (il met son masque.)
IORDACHE Ce n’est pas possible, il n’y a pas d’autre sortie; Allons-y! (il met lui aussi son masque.)
CANDIDAT (avec un MASQUE qu’il conduit de force à son bras ; il a bu ; il sort son masque et parle à haute voix ) Je suis comme ça… Voilà les amis…
NAE (doucement) Au diable!
UN MASQUE (voulant se débarrasser de son bras) Laissez-moi.
DIDINA Qui est-ce? (Nae, Iordache et Didina parlent doucement à côté) CATINDATUL C’est comme ça que je suis; quand je magnétise, j’ai chaud ... Pfu! ... Et quand j’ai chaud, pfu! Je taquine ... j’ai besoin de vous faire un quadrille. Voilà, nous avons trouvé les voisins ...
DIDINA Allons-y! (Je vais partir.)
CANDIDAT Que faites-vous? Il ne faut pas partir! (Il se met devant eux, dans leur chemin.) Nous devons faire un quadrille.
NAE Merci, mon chéri, nous rentrons à la maison ...
CANDIDAT À la maison? Avec mon costume? Impossible, (il crie fort.) Si vous partez, rends-moi le costume d’abord, tu dois me donner le costume, je ne te laisserai pas partir avec le costume ...
NAE (doucement) On est en retard à cause de l’idiot!
DIDINA (lentement) Changez de costume et fais le paix!
IORDACHE (doucement) On ne peut pas sortir à travers le bal: Mița connaît le costume ...
NAE (doucement) Que faire?
IORDACHE (doucement) Dis-lui que nous restons ...
DIDINA (doucement) Et nous nous glissons gentiment et sortons ...
NAE (bruyamment) Si oui, alors, vous savez quoi? ‘Nous resterons.
IORDACHE Restons ...
DIDINA Restons ...
CANDIDAT Alors oui! ‘Nous allons faire le quadrille ...
IORDACHE au salon du bal?
NAE Je ne vais pas au salon du bal.
CANDIDAT Alors ici; Je suis magnétisé, j’ai envie d’un quadrille, je me lance. Où est l’oncle Iancu pour me voir!
IORDACHE (doucement à Nae et Didina) Jouez-lui une figure, deux, jusqu’à ce qu’il oublie le costume, puis nous nous effaçons à l’anglais, (tous les trois parlent doucement.)
UN MASQUE Je vous ai dit que j’avais peur que mon mari me voie ... (il se batte pour s’échapper.) (Le masque sursauta, s’échappa et s’enfuit; tout en le regardant)Tans pis !(Il va et inviter Iordache à la danse.) Eh bien, allez! Que faites-vous? (il met son masque de danse.)
NAE Hey, allez! (On peut entendre une figure comme un quadrille. Nae danse avec Didina, Catindatul avec Iordache comme une dame. A la deuxième figure de la contre danse, au fond du salon appraissent Pampon, Crăcănel et Miţa masqués.)
Cette page a été rédigée pour ROMA·NET par Alice Toma. |