Le'utopiee dans la littérature portugaise

O sonho comanda a vida (António Gedeão)

O sonho comanda a vida (le rêve commande la vie), voici une phrase connue de la plupart des Portugais. Il s’agit d’un vers du poème Pedra Filosofal (Pierre philosophale) de António Gedeão, pseudonyme de Rómulo de Carvalho, rendu célèbre surtout après avoir été mis en musique dans les années 70 du XXe siècle.

Rómulo de Carvalho est née à Lisbonne en 1906. En son hommage, depuis 1996, le jour de sa naissance, le 24 novembre, marque la Journée Nationale de la Culture Scientifique. En effet, Rómulo Vasco da Gama de Carvalho, fut un homme de science, pédagogue et historien. Ayant enseigné la physique et la chimie, il est auteur de plusieurs ouvrages de vulgarisation scientifique, notamment sur l’histoire de la science et de l’enseignement au Portugal.

Ce n’est qu’à l’âge de 50 ans que l’auteur, signant alors António Gedeão, fait paraitre son premier livre de poèmes, Movimento Perpétuo (Mouvement Perpétuel), où nous trouvons Pedra Filosofal. Il trouvera très rapidement la reconnaissance parmi d’autres auteurs consacrés de l’époque, notamment en raison d’une originalité d’expression à laquelle n’est pas étrangère le recours à une terminologie ou des images du domaine scientifique – le poème en question en est un bon exemple. Mais la reconnaissance du grand public viendra en 1970, dans les dernières années de la dictature, lorsque Manuel Freire chante son poème, en faisant une chanson de résistance, un hymne au rêve de la liberté et de la démocratie.

Pedra filosofal
Eles não sabem que o sonho
é uma constante da vida
tão concreta e definida
como outra coisa qualquer,
como esta pedra cinzenta
em que me sento e descanso,
como este ribeiro manso
em serenos sobressaltos,
como estes pinheiros altos
que em verde e oiro se agitam,
como estas aves que gritam
em bebedeiras de azul.Eles não sabem que o sonho
é vinho, é espuma, é fermento,
bichinho álacre e sedento,
de focinho pontiagudo,
que fossa através de tudo
num perpétuo movimento.Eles não sabem que o sonho
é tela, é cor, é pincel,
base, fuste, capitel,
arco em ogiva, vitral,
pináculo de catedral,
contraponto, sinfonia,
máscara grega, magia,
que é retorta de alquimista,
mapa do mundo distante,
rosa-dos-ventos, Infante,
caravela quinhentista,
que é Cabo da Boa Esperança,
ouro, canela, marfim,
florete de espadachim,
bastidor, passo de dança,
Colombina e Arlequim,
passarola voadora,
para-raios, locomotiva,
barco de proa festiva,
alto-forno, geradora,
cisão do átomo, radar,
ultra-som, televisão,
desembarque em foguetão
na superfície lunar.Eles não sabem, nem sonham,
que o sonho comanda a vida.
Que sempre que um homem sonha
o mundo pula e avança
como bola colorida
entre as mãos de uma criança.         
Pierre philosophale    Ils ne savent pas que le rêve
est une constante de la vie
si concrète et définie
comme toute autre chose,
comme cette pierre grise
où je m’assois et je me repose,
comme ce doux ruisseau,
en sereins sursauts,
comme ces grands sapins
qu’en vert et or remuent,
comme ces oiseaux qui hurlent
en ivresse de bleu.Ils ne savent pas que le rêve 
c’est du vin, c’est de la mousse, c’est de la levure,
petite bête enjoué et assoiffé,
museau pointu,
qui fossoie à travers tout
dans un mouvement perpétuel.Ils ne savent pas que le rêve 
c’est de la toile, c’est de la couleur, c’est du pinceau,
base, fut, chapiteau,
arc en ogive, vitrail,
flèche de la cathédrale,
contrepoint, symphonie,
masque grec, magie,
qu’il est la cornue de l’alchimiste,
carte du monde lointain,
rose des vents, Infant,
caravelle cinqcentiste,
qu’il est le cap de Bonne-Espérance,
or, cannelle, ivoire,
fleur d’épéiste,
coulisses, pas de danse,
Colombina et Arlequin,
gros oiseau volant,
paratonnerre, locomotive,
bateau d’étrave festif,
four haut, générateur,
atome divisé, radar,
ultrason, télévision,
débarquement sur fusée
sur la surface lunaire.Ils ne savent pas, ils ne rêvent même pas,
que le rêve commande la vie.
Que chaque fois qu’un homme rêve
le monde fait des bonds et avance
comme une boule colorée
entre les mains d’un enfant.

revue roma blanc 120 Cette page a été rédigée pour ROMA·NET par Ana Corga Vieira.
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