La langue portugaise en conflit
Operários, Tarsila do Amaral (1933) (Ouvriers)
Vício na fala
Oswald de Andrade (1890 – 1954)Para dizerem milho dizem mio
Para melhor dizem mió
Para pior pió
Para telha dizem teia
Para telhado dizem teiado
E vão fazendo telhados
Traduction :
Erreur de prononciation
Pour dire “milho” ils disent “mio” (maïs)
Pour dire “melhor” ils disent “mió” (mieux, meilleur)
Pour dire “pior” – “pió” (pire)
Pour “telha” ils disent “teia” (toit)
Pour “telhado” ils disent “teiado”
Mais c’est sont eux qui construisent, les toits (les toits – os “telhados”)
Ce poème est consacré au conflit entre le portugais courant et le portugais correct des personnes cultivés des classes supérieures. Dans ce poème, ceux qui prononcent certains mots de façon incorrecte (« moi », « mió », « pió », « teia », « teiado ») sont charpentiers et couvreurs qui construisent les toits. Le lecteur voit d’abord que l’auteur reproche aux artisans de mal prononcer les mots, mais la phrase finale change le sens du poème : ces artisans construisent les toits, et sont donc tout aussi importants dans la société que les intellectuels qui maitrisent la forme correcte du portugais littéraire. En construisant les toits, ces gens créent une langue différente. Le poème reflète le conflit qui existe dans la société brésilienne, entre les classes sociales, illustre comment ce conflit transparaît dans les formes de la langue.
Un autre conflit du portugais est celui qui oppose sa forme européenne (du Portugal) et la langue du Brésil. La grammaire scolaire, dite classique, a tendance à répéter plutôt la norme du Portugal. Cependant, des inversions et certains usages "incorrects" (non reconnus) caractérisent les particularités de la langue portugaise du Brésil. Voici un autre poème du même auteur qui montre la différence entre la théorie et la pratique d’une langue. L'auteur est en faveur de la langue vivante qui introduit des formes non reconnues par la grammaire. « Dê-me um cigarro » (Donne-moi une cigarette) représente l'équivalent correct de la phrase « Me dá um cigarro », la phrase avec l'inversion est considérée comme une forme propre à la nation brésilienne, qui a le droit d'exister et d'être utilisée dans la langue, et qui est utilisée tous les jours, tant par les noirs que par les blancs.
Pronominais
Oswald de AndradeDê-me um cigarro
Diz a gramática
Do professor e do aluno
E do mulato sabido
Mas o bom negro e o bom branco
Da Nação Brasileira
Dizem todos os dias
Deixa disso camarada
Me dá um cigarro
Cette page a été rédigée pour ROMA·NET par Maria Kistereva. |