L'expression du rêve en latin

On peut, grâce à la comparaison, remonter à une racine reconstruite du mot somnium en proto-indo-européen : *swe-p-, *swe-d-/*swop. Il s’agit d’un thème II en CC-eC avec un degré plein et fléchi. Or, nous pouvons reconstruire aussi un thème III en CC-C au degré zéro *su-p-, suivi par des suffixes *-no-, *-to. 

Sur la base du degré zéro qu’on vient de voire, se sont constitués les mots en grec et en sanskrit pour désigner le rêve : on a, d’un côté, ὕπνος (*hup-nos) (la sifflante à l’initiale en grec s’affaiblit jusqu’à devenir une aspirée pour, ensuite, disparaitre complètement et laisser une aspiration signalée par l’esprit rude) ; de l’autre sup-tá- (le suffixe est bien *-to, or le sanskrit connait une confusion de timbre qui transforme ses voyelles (sauf i, u) en –a). 

Sur la base du thème *swe-p- on a, en sanskrit, d’adjectif dérivé sv-ap-i-ti, en latin, cette fois sur base du degré fléchi *swop, on a somnium (dérivé en –i de somnus qui se construit sur la même racine indoeuropéenne).

Pour désigner le rêve, en latin, la forme somnium est la plus courante (Cic. Div. I, 132), or, ce mot, traduit en français, ou en une autre langue romane, peut aussi signifier illusion, imagination. Sur la base de somnium, le latin fournit un dérivé : un substantif de la 3e déclinaison à valeur d’agent en –tor : somniator, is. Une autre façon, bien que beaucoup moins attestée, de designer le rêve est le mot pour désigner le sommeil lui-même : somnus. En effet, les Anciens ne reconnaissaient pas forcément une grande différence entre sommeil et rêve et cela est confirmé par la figure de Somnus, divinité personnification du sommeil qui recouvre aussi le rôle de « père des rêves ». Fils d’Erèbe et de Nuit, frère de Mort, Somnus correspondait au dieu grec Hypnos. D’après Virgile, sa demeure se trouvait dans l’Hadès, d’après Ovide dans le pays des Cimmériens. On le représentait souvent ailé alors qu’il parcourait la terre et faisait endormir les hommes (en les guidant dans leurs rêves).

revue roma blanc 120 Cette page a été rédigée pour ROMA·NET par Matteo SERRA
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