Les degrés de l'adjectif en latin

Les adjectifs qualificatifs latins possèdent trois degrés de comparaison : le positif, le comparatif et le superlatif. Le positif désigne la forme « de base » de l’adjectif, sans information supplémentaire. Quant au comparatif et au superlatif, ces formes seront développées ci-dessous.

Il faut toutefois noter d’emblée qu’en latin classique, sauf exception, leur forme est synthétique et non analytique (comme en français). En d’autres mots, les comparatifs et superlatifs latins ne sont pas formés par l’ajout d’un adverbe, mais par l’ajout d’un suffixe à l’adjectif. Par exemple, le comparatif longior est l’équivalent latin du comparatif français « plus long » (un mot en latin, deux mots en français).

1. Le comparatif

Il existe plusieurs types de comparatifs : le comparatif d’égalité, le comparatif de supériorité et le comparatif d’infériorité. Par commodité, le comparatif de supériorité est appelé « comparatif ». Il s’agit en effet de la seule construction synthétique parmi les différents types de comparatifs, les deux autres étant périphrastiques (ou analytiques).

Thisbe tam pallida quam buxum est[1]
(Thisbé est aussi pâle que le buis)

Thisbe pallidior quam buxum est6
(Thisbé est plus pâle que le buis)

Thisbe non tam pallida quam buxum est6
(Thisbé est moins pâle que le buis)

Le comparatif se construit en ajoutant le suffixe –ior, –ior, –ius (gén. –ioris) au thème de l’adjectif. Il se décline comme un adjectif de la deuxième classe, type omnis.

longus, a, um (thème long-) ⟶ longior, ior, ius
gravis, is, e (thème grav–) ⟶ gravior, ior,  ius.

Le comparatif peut s’employer seul. Dans ce cas, il exprime soit l’excès, soit l’intensivité relative.

Thisbe pallidior est6
(Thisbé est trop pâle / Thisbé est assez pâle)

Il peut égaler s’employer avec un deuxième terme de comparaison, qui est l’élément qui sert de point de départ à la comparaison. Celui-ci est soit à l’ablatif de comparaison, soit introduit par quam et au même cas que le comparatif.

Thisbe pallidior est buxo / quam buxum6
(Thisbé est plus pâle que le buis)

Petite subtilité : lorsqu’il compare deux individus, le latin utilise le comparatif alors que le français utilise le superlatif. Par exemple, tandis que le français dira qu’entre Thisbé et Pyrame, « Thisbé est la plus pâle » (un superlatif), le latin dira que « Thisbe pallidior est » (un comparatif).

2. Le superlatif

Le superlatif se construit en ajoutant le suffixe –issimus, a, um au thème de l’adjectif. Il se décline comme un adjectif de la première classe, du type bonus.

longus, a, um ⟶ longissimus, a, um
gravis, is, e ⟶ gravissimus, a, um.

Certaines formations apparaissent comme différentes, pour des raisons phonétiques. Par exemple, les adjectifs en –er ont un superlatif en –rimus (positif miser, superlatif miserrimus), ceux en –ilis un superlatif en –limus (positif facilis, superlatif facillimus).

Le superlatif peut s’employer seul : il est alors appelé « superlatif absolu ». Il exprime dans ce cas le très haut degré de la qualité véhiculée par l’adjectif.

Pyrame, tua carissima Thisbe nominat[2]
(Pyrame, ta très chère Thisbé t’appelle)

Le superlatif peut également être « relatif ». Il est alors accompagné d’un complément qui restreint le champ d’application du superlatif. Ce complément peut se construire de différentes manières : il est soit mis au génitif, soit à l’ablatif introduit par la préposition ex, soit à l’accusatif introduit par la préposition inter.

Pyramus pulcherrimus est iuvenum / ex iuvenibus / inter iuvenes[3]
(Pyrame est le plus beau des jeunes hommes)

3. Cas particuliers

Certains adjectifs construisent leur comparatif et leur superlatif de façon irrégulière. Il existe deux cas de figure :

  1. Le thème du positif est différent des thèmes du comparatif et du superlatif. Par exemple, pour l’adjectif signifiant « bon », le positif est bonus, a, um, tandis que le comparatif est melior, ior, ius et que le superlatif est optimus, a, um. Il est intéressant de constater que le positif bonus a subsisté en français sous la forme de « bon », dont le comparatif « mieux » et le superlatif « meilleur » dérivent tous deux du comparatif latin melior, ius. Le superlatif latin optimus, quant à lui, a survécu dans le français « optimal ».
  2. Le comparatif et le superlatif sont ceux de termes synonymes. Par exemple, l’adjectif novus, a, um (« nouveau ») emprunte à l’adjectif recens, entis ses comparatif et superlatif, respectivement recentior, ior, ius et recentissimus, a, um. À noter que le terme novissimus, a, um existe en latin, mais qu’il signifie « le dernier » et non pas « le plus nouveau », comme sa forme pourrait le suggérer.

[1] Adaptation libre d’Ovide, Métamorphoses IV, 134-135.

[2] Adaptation libre d’Ovide, Métamorphoses IV, 144-5.

[3] Adaptation libre d’Ovide, Métamorphoses IV, 55.

revue roma blanc 120 Cette page a été rédigée pour ROMA·NET par Guillaume Quintin et Timothée Coussement.
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