La structure du lexique roumain

Une statistique du XXe siècle concernant la composition du lexique roumain selon l'étymologie des mots donne les pourcentages suivants :

  • 43 % d'emprunts aux langues romanes occidentales (dont 38,40 % au français) ;
  • 20 % de mots hérités du latin ;
  • 11,5 % d'emprunts aux langues slaves (vieux-slave, bulgare, serbe, ukrainien, russe) ;
  • 3,60 % d'emprunts au turc ;
  • 2,40 % d'emprunts au grec ;
  • 2,17 % d'emprunts au hongrois ;
  • 2 % d'emprunts à l'allemand.

L'histoire du roumain comporte trois étapes principales :

  • du IIe au IXe siècle, depuis les guerres romanes jusqu'à l'apparition des populations d'origine slave sur le territoire de l'ancienne Dacie ;
  • du IXe au XIXe siècle, où l'on assiste à la formation de la langue roumaine littéraire ;
  • du XIXe siècle à nos jours.

Après la conquête de la Dacie par Trajan, le latin vulgaire devient la principale langue parlée sur le territoire de l'ancienne Dacie ; le substrat de la langue roumaine, la langue géto-dace, a une contribution réduite à la formation de la langue roumaine. La liste des mots d'origine dace dans la langue moderne tourne autour de 50 mots, tout en variant d'un chercheur à l'autre. On peut noter quelques exemples :

brad 'sapin', brânză 'fromage', buză 'lèvre'

Le lexique roumain de base provient du latin :

  • les noms des parties du corps

cap 'tête', deget 'doigt', mână 'main'

  • des jours de la semaine

luni, marţi, miercuri, joi, vineri, sâmbătă, duminică 

  • ainsi que

câine 'chien', pâine 'pain', apă 'eau', a mânca 'manger', a veni 'venir'…

Sur cette base du roumain viennent s'ajouter diverses influences, dont la plus importante est celle du slave ancien. Beaucoup de mots proviennent de cette langue :

plug 'charrue', lopată 'pelle', brazdă 'sillon'…

L'influence slave se poursuit par l'église, la religion des Roumains étant le christianisme orthodoxe et la langue de l'église étant le slavon. À l'influence slave s'ajoutent les emprunts grecs, hongrois, turcs et allemands.
La troisième étape dans le développement de la langue roumaine est une étape de modernisation. Au XIXe siècle, la société roumaine commence à se moderniser sous l'influence de l'Europe de l'Ouest, phénomène dont l'un des corollaires est l'emprunt massif de mots, qui détermine une relatinisation du roumain, soit à partir du latin savant, soit à partir d'une langue romanes, surtout le français ou parfois l'italien. Du latin on a des exemples d'emprunts tels que : 

fabulă 'fable', familie 'famille', literă 'lettre (caractère)', rege 'roi', tezaur 'trésor'

Parfois, on ne peut pas établir de laquelle de ces langues provient tel ou tel mot. Par exemple, belicos peut avoir comme étymon lat. bellicosus, ital. bellicoso ou fr. belliqueux. On parle souvent de l'étymologie multiple pour désigner les mots roumains qui ont deux ou plusieurs langues-sources potentielles.
Il y a aussi des cas où la langue a adopté, à côté d'un mot hérité, un dérivé formé dans une langue romane à partir de l'étymon du mot de base :

lat. aqua > roumain apă « eau » – lat. aquaticus / français « aquatique » > roum. acvatic ;
lat. frigus > roum. frig « froid » – lat. frigidus / fr. « frigide » > roum. frigid ;
lat. tacere > roum. a tăcea « (se) taire » – lat. tacitus / fr. « tacite » > roum. tacite.

De nos jours, les mots nouveaux viennent surtout de l'anglais. Leur degré divers d'intégration prouve qu'ils sont entrés plus ou moins récemment dans la langue. Les mots anglais empruntés à une époque plus éloignée se prononcent et s'écrivent à la roumaine : 

blugi 'blue-jeans', gem 'confiture', interviu 'interview', lider 'dirigeant', meci 'match'

Les emprunts plus récents se prononcent et s'écrivent comme dans la langue d'origine

cow-boy, fair-play, jazz, hobby, management, manager, marketing, mass-media, week-end…

mais on leur attribue un genre, un article défini et des désinences selon les règles du roumain :

managerul 'le directeur', cowboy-ului 'au/du cow-boy', mass-mediei 'aux/des médias'

revue roma blanc 120 Cette page a été rédigée pour ROMA·NET par Alice Toma.
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